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Le Ponts habité vers un élément
de projet urbain ?
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2] Le pont habité comme élément liant
de la vie urbaine.
Les recherches danimation urbaines prennent aujourdhui,
le pas sur le formalisme architectural, sur lexpression
construite dun dessin, voire sur la beauté dune
façade, et trouvent dans létrangeté,
dans la magie du pont urbanisé, un territoire privilégié
pour sy implanter.
Bâtir sur un pont peut engendrer, dune matière
concrète, ce nouveau type doccupation du temps
et de lespace.
2.1 ] Le renouveau dun modèle, une nouvelle
vie.
Le pont habité, ou urbanisé pourrait
permettre la création dun nouveau mode de vie,
un moyen de concevoir, avec lappui dun concept architectural,
un changement des structures sociales, de production et dappropriation.
On recherche de plus en plus des expressions construites de
convivialité. Dans le concept de pont urbanisé,
lévidence de lintroduction dun nouveau
mode de vie y est certainement plus vraisemblable quailleurs.
La pratique sociale, sur un territoire urbain neuf, peut y être
elle-même neuve, et ainsi de suite, rien y est à
transformer, il sagit dimaginer.
Et puis, ce territoire artificiel pouvant être curieux,
à la fois par son insularité, et par sa capacité
innovante, donne la parole aux citoyens. Mais, à
la différence des tissus urbains classiques où
la symbolique est parcellisée, celles des ponts urbanisés
est, elle, une symbolique globale ; donc les utilisateurs sont
eux-mêmes obligés dy intégrer leurs
propres actions. Intervient dans un contexte comme celui-ci,
un nouveau comportement de leur part ; car on nest plus
en présence, par exemple de la rue, encore moins de la
rue étroite, lieu fragile. Il y a introduction
de nouveaux moyens de communication et danimation, et
cela est essentiel, se voir, se mouvoir, percevoir, échanger
dans un espace autre.
Cela est une première approche vers un changement de
la signification urbaine. La rencontre de lautre
se fait en dehors de la voiture, en dehors des gigantesques
volumétries, en dehors dun mouvement pendulaire
préréglé, dune fonctionnalité
préétablie et définitive. Il faut attirer
lattention sur un autre aspect de lappropriation
des espaces, du fait de la production de terrain artificiel,
mais en réalité municipal car le pont-support
appartient à la ville, limplantation de programmes
déquipements socioculturels ne doit plus poser
de problèmes. Les effets entraînants dun
pont urbanisé sont multiples, outil de communication
et aussi de revendication, véhicule et vecteur culturel,
lieu de passage donc dinformation et dapprentissage,
réservoir artisanal et lieu de promenade piétonnière,
support pour le passage des transports collectifs.
Le pont urbanisé est lié par ses deux extrémités
au tissu urbain ; sa singularité le rend certes plus
vulnérable mais aussi plus recherché. Il contient
les qualités aujourdhui, nécessaires au
développement par le dedans des villes.
2.2 ] Nouveau sol, nouveaux échanges.
Le pont urbanisé, permet la création
dun nouveau sol urbain, une véritable scène
urbaine, qui se laisse peupler à volonté.
Il y a dans cette attitude, une volonté de signifier
aux populations, aux usagers de lespace urbain, lexistence
dun lieu où la fête urbaine peut
à nouveau se manifester.
Il est probable que les cités futures devront accorder
à la fête, à la libération
de limaginaire, de son aliénation aux interdits
sociaux, une part importante dans la vie de leurs habitants.
Actuellement on découvre, ou on redécouvre de
nouveaux mérites à la rénovation ou à
la réhabilitation des tissus urbains anciens, et cest
peut-être le pont urbanisé qui, situé dans
des sites très divers (au-dessus de leau, enjambant
le chemin de fer ou des autoroutes), fournira les expériences
urbaines nécessaires à lévolution
de la ville. La rue ne peut pas, ne peut plus être le
seul lieu de contact urbain entre citoyens ; la rue est devenue
un égout qui achemine les choses, les hommes,
voire les idées (la publicité par exemple), mais
sans que ces trois identités se frottent, se croisent,
se touchent, se voient, se connaissent, se confrontent
Bien sûr, la ville dispose dautres lieux, les places,
les arcades, les parcs, les jardins, les promenades, les passages
ouverts
pour mettre en jeu toutes la stratégie
des échanges et des confrontations.
Le pont urbanisé, avec toutes les références
historiques, féconde une communauté, cela est
évident à travers lanalyse des situations
antérieures, et cette communauté doit sadapter
à une réalité. Mais ici joue pleinement
lacte dexclusion que professent tous ceux qui admettent
seulement lévolution linéaire, homogène
de la ville. Or historiquement, cette linéarité
sans soubresaut est mortelle, la toujours été
et le sera toujours.
Ce nest pas par souci dhistoricité, que la
réinsertion des ponts urbanisés dans le circuit
des réflexions actuelles durbanisme et darchitecture
se fait ressentir mais par besoin de convivialité urbaine
qui exige de nouvelles formes dagglomération des
hommes et de leurs activités, aujourdhui, là
où les possibilités économiques et techniques
le permettent.
Il se crée dans le pont urbanisé un sentiment
dappartenance qui fait défaut dans la plupart des
réalisations actuelles et, que dans la quasi-totalité
des citoyens réclament, que la quasi-totalité
des promoteurs proposent sans jamais fournir les éléments
permettant la concrétisation du cadre pouvant évoquer
ce sentiment dappartenance.
3] Notion de pont habité indissociable du contexte urbain
?
Cest la densité même de la ville qui justifie
généralement le recours à la notion de
pont habité ou parfois, la volonté durbaniser
un site et donc par définition de le densifier.
Il existe toutefois quelques rares exemples de bâtiments
célèbres qui ont été délibérément
conçus comme des ponts en dehors des villes.
Dans la plupart des cas connus, les ponts habités instauraient
une relation organique entre deux quartiers urbains préexistants.
Mais il existe aussi quelques exemples intéressants où
le pont habité a été construit pour permettre
la naissance dun nouveau quartier qui naurait pas
pu se développer, car son site était physiquement
hors de la ville.
Ainsi à Paris, lîle Saint-Louis était
restée vierge de toute construction jusquau début
du XVIIè siècle. Un entrepreneur nommé
Christophe Marie proposa alors de lurbaniser. En 1614,
les autorités lui donnèrent cette autorisation,
à condition quil construise au nord et au sud de
lîle deux ponts habités pour assurer une
relation organique optimale entre ce futur quartier insulaire
et le reste de la ville.
En Angleterre, dans la cité thermale de Bath, France
Pulteney avait hérité dun terrain de trois
cents hectares nommé Bathwick, et situé à
proximité directe du centre urbain mais de lautre
côté de la rivière. Afin de créer
une continuité urbaine entre le centre historique et
le futur quartier à construire, larchitecte Robert
Adam fut sollicité en 1770 pour édifier un pont
bordé de boutiques. Inspiré par divers modèles
italiens, dont celui de Palladio, il réalisa à
Bath le dernier pont habité de lEurope préindustrielle,
et permis ainsi au nouveau quartier de se développer
avec succès. Une démarche similaire sera appliquée
par lurbaniste Michel Ricard, en 1990 à Reuil-Malmaison,
dans la banlieue nord ouest de Paris, pour créer
un nouveau quartier coupé du centre urbain par une autoroute
urbaine.
3.1 ] Le pont habité comme élément liant
du tissu urbain
Létouffement des centres historiques est patent
dans un grand nombre de villes. Il y a une impossibilité
de développement, car les destructions sont souvent interdites,
et les rénovations difficiles et, au-delà des
centres, il y a eu une prolifération de Z.U.P. et de
Z.A.C., de territoires aménagés et meublés
avec souvent beaucoup dindifférence. Souvent ces
mêmes villes sont traversées par des fleuves ou
des rivières importantes, cest le cas de Rouen,
Rennes, Angers, Nantes, Châlon, Avignon, Grenoble, Lyon
Des ponts existants sont à rénover, des nouveaux
ponts sont à programmer.
Ainsi, on assiste donc à un besoin de re-configurer le
tissu urbain, actuellement stagnant et fragile ; le pont voué
initialement à conforter la circulation des véhicules
donc à troubler encore plus le tissu urbain, pourrait,
si les décideurs en acceptent laugure, devenir
un élément de développement urbain important.
Dans la terminologie urbaine actuelle, le pont continue à
être considéré comme un phénomène
isolé en soi, alors que notre volonté est de le
fondre dans lensemble du tissu urbain en lui attribuant
les mêmes qualités. Par rapport à la majorité
des tissus urbains existants, le pont urbanisé est lui,
formé et constitué dun tissu contigu-continu
qui existait déjà dans la morphologie des ponts
habités du XIIè siècle. Le pont urbanisé
peut donc par sa constitution, offrir à la ville des
alternatives, des choix structurels différents de ce
que limplantation de terrains à fonction unique,
exclusive et ciblée pourraient produire comme événements
urbains.
Le pont urbanisé apparaîtrait donc comme une solution
pour que deux quartiers, au lieu de signorer, sunissent
et échangent. Dès que lon fixe le but, dès
que lon compare cette solution avec celles qui traditionnellement
éparpillent les équipements, alors on saperçoit
combien il est non seulement commode mais utile et nécessaire
davoir à sa disposition une linéarité
urbaine viabilisée (terrain artificiel) apte à
recevoir ce qui est programmé et peut-être plus.
Le terrain est propriété de la ville, elle se
donne la possibilité de jouer dans le temps
avec les éléments spacialisés.
Une des qualités primordiales du pont urbanisé
en est la dimension socio-politique, économique et collective.
Cest ensuite à lintérieur de cet organisme
plus ou moins complexe que se valorisent les biens individuels
par une différenciation fonctionnelle et formelle. Alors,
le pont urbanisé, si sa forme et son contenu saccordent
au tissu urbain existant en y marquant avec force les termes
de son évolution, devient lui-même, une méthode
dévolution.
Cela veut dire que la sémantique de ces lieux en est
une propre, qui na pas son équivalence parmi les
autres éléments majeurs du langage urbain : places,
perspectives, promenades, quartiers, rues, avenues
Chacun
de ces différents termes à son identité
spatiale formelle, chacun de ces termes est déterminé
et déterminant alors que le pont urbanisé est
un espace social sans spéculation des activités
; il les supporte, il les porte toutes et de ce fait est un
réservoir de potentialités fonctionnelles ; à
la limite, pour la ville et sa population qui le transite jour
et nuit, le pont urbanisé est un élément
urbain radiant, diffusant, un distributeur de connaissances
et cest en cela quil est effectivement singulier.
Cest certainement la raison de la destruction de ce modèle
au XVIIIè siècle, ce ne sont pas les mauvaises
conditions sanitaires, dailleurs visibles sur lensemble
dun territoire urbain qui justifia la destruction systématique
des ponts habités ; cest leur singularité
urbaine, leur insularité qui ont gêné et
gênent certainement encore ceux qui administrent les villes.
3.1.A ] Un modèle si gênant ?
Deux notions caractérisent le pont habité : la
transversalité et linsularité ; elles invoquent
une description de type esthétique, une signification
formelle. En effet, la position obligatoire du pont urbanisé
dans le tissu dune ville est forcément transversale,
et parce que relié à ses deux extrémités
à la ville, il devient malgré tout insulaire par
la spécificité de ses formes, de son profil, et
par le rapport quil établit ou non avec lenvironnement
naturel : leau, ou artificiel : la ville.
La transversalité des ponts est une image incongrue sinon
inconnue dans ce que lon a toujours appelé la composition
urbaine. Du fait que le pont est, visuellement une construction,
toute proportion gardée, invisible ou peu visible dans
un paysage urbain, cette place de la transversalité ne
se trouve occupée par aucune autre construction ; ainsi,
il ne sagit pas seulement de combler un vide mais faire
du pont lui-même, un vecteur de développement de
la ville.
Dabord cela oblige de programmer et de construire à
lintérieur de la ville, souvent en plein centre,
donc dans une zone dynamique ; il ne faut pas négliger
dans cette situation exceptionnelle lélément
essentiel de lurbanisation du pont : la densité
de population disponible qui va de suite semparer de ce
qui se trouvera programmé et ensuite construit sur le
pont.
Cet outil urbain original se différencie par une double
orientation donc un ensoleillement continue, cette position
lui donne une valeur exceptionnelle sur le plan urbain. On peut
donc se rendre compte que cette position en travers
de la ville favorise et conforte le discours idéologique
que lon pourrait inculquer au pont urbanisé en
tant que phénomène relationnel dans la ville.
Le fait est là, urbaniser un pont nest pas une
utopie fonctionnelle et encore moins formelle. Justifier dabord
la réalité formelle est certes plus facile mais
aussi plus convaincant car le territoire artificiellement créé
prend sa place aisément au-dessus de leau, élément
naturel, miroir ponctuel, assise proche et lointaine. Il se
crée ainsi un point dintérêt majeur
ailleurs que sur les rives, cette situation peut même
aller jusquà conférer au pont urbanisé
une qualité complémentaire, celle de centralité.
Il est possible dimaginer quun centre historique
où sexercent les fonctions les plus diverses, soit
saturé au point de vue de la densification et du terrain
disponible à bâtir. Créer un pont nouveau
et lurbaniser est une solution dépourvue de toute
utopie.
La notion dinsularité quant à elle ne peut
faite partie des caractéristiques des ponts urbanisés
que si leur planimétrie et leur volumétrie concourent
à mettre en uvre une physionomie toute particulière
de lensemble construit. Certes le tablier a ses connexions
avec lenvironnement immédiat, créant une
unité avec le voisinage. Cela nempêche pas,
du moment que le pont nest plus seulement un lieu de passage,
den faire un espace urbain ayant des caractéristiques
de centralité, donc dinsularité.
Le pont urbanisé a une relation conflictuelle avec le
reste de la ville et son paysage, mais il est en accord avec
la démarche de la population, avec ses besoins. Si le
pont urbanisé peut exister dans le contexte actuel cest
aussi parce que dautres éléments urbains
ont tendance à disparaître comme la rue qui perd
petit à petit ses charmes.
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